Selon l'ordonnance modifiant sa loi de finances 2024, qui a été signée le 20 juin 2024, l'État du Cameroun a publié des obligations sur le marché international des capitaux ce mardi 23 juillet. D'après des informations provenant du ministère des Finances, il s'agit d'un investissement privé avec Citigroup Global Markets Ltd comme seul intermédiaire financier. L'opération a également été organisée en collaboration avec Cygnum Capital Middle East, une entreprise spécialisée dans la banque d'investissement et la gestion d'actifs sur les marchés émergents et de frontière, par ce groupe financier, qui est présent au Cameroun à travers la banque Citibank.

La réalisation de cette opération a abouti à la collecte de 550 millions de dollars (soit plus de 332 milliards de FCFA à la valeur actuelle du dollar) à un taux d'intérêt de 10,75% et une durée de sept ans. Ce chiffre est en dessous des 336 milliards de FCFA requis, conformément au décret d'autorisation signé par le président de la République, Paul Biya, le 22 juillet 2024. « Nous avons émis 550 millions de dollars. Au moment de l’élaboration des documents, cela correspondait à peu près à 336 milliards de FCFA », explique une source bien au fait du dossier.

De plus, le taux d'intérêt semble élevé en comparaison avec les émissions récentes d'euro-obligations provenant de pays africains de même niveau de développement. Il est important de souligner que la Côte d'Ivoire a levé 2,6 milliards de dollars en janvier dernier grâce à deux émissions de 9 et 13 ans de durée, avec des taux d'intérêt respectifs de 6,30% et 6,85%. Le Bénin a suivi son exemple en février en mobilisant 750 millions de dollars pour un taux d'intérêt de 7,9% et une durée de 14 ans. Ensuite, le Kenya a collecté un montant de 1,5 milliard de dollars à un taux d'intérêt de 10,37% sur une période de six ans. Le Sénégal a reçu 750 millions de dollars il y a un mois à un taux d'intérêt de 7,75% pour une période de 7 ans.

« Ce sera nécessairement plus élevé qu’en 2021 (en référence au taux de 5,95% obtenu lors du refinancement de son eurobond de 2015, NDLR), et ce n’est pas le fait du Cameroun. Tous les émetteurs paient le prix », avait indiqué une source impliquée dans la préparation de l’opération au ministère des Finances. C’est dire qu’en préparant son opération, le Cameroun s’attendait à un taux d’intérêt élevé. En outre, le pays a été classé B (Fitch Ratings), Caa (Moody's) et B- (Standard & Poor's) pour ses emprunts à long terme en devises étrangères. Au début de l'année, la note du Cameroun avait même été dégradée par Moody's et Standard & Poor's (S&P) en raison de retards de paiement. Toutefois, S&P a opté pour une augmentation d'un cran à B- en raison des améliorations dans la gestion budgétaire.

Les fonds alloués à cette opération sont utilisés pour régler les factures en cours auprès du Trésor public. Lors de la révision de la loi de finances 2024, l'enveloppe prévue pour régler les dettes restant à payer a connu une augmentation de 317 milliards de FCFA, atteignant 537 milliards de FCFA. « Le marché domestique n’a pas suffisamment de profondeur pour permettre de mobiliser des volumes importants de ressources sur de longues maturités, d’où le recours aux marchés financiers internationaux », avait-on justifié au ministère des Finances.

L'État du Cameroun avait à l'origine l'intention de régler ces factures sur une longue période avant d'être obligé par les objectifs de son programme avec le Fonds monétaire international (FMI) de les payer en urgence. En contractant un prêt à long terme, le pays remplit les conditions de son programme avec le FMI, tout en prolongeant le remboursement de la dette sur la période initialement prévue. C'est pourquoi on a opté pour le marché mondial des capitaux. Toutefois, le niveau d'intérêt de 10,75% obtenu devrait avoir un impact sur le remboursement de la dette dans les années à venir, en plus du risque de change associé à toute dette en dollar.