Hausse des prix des carburants : le FMI de nouveau aux trousses du gouvernement camerounais.
Dernière mise à jours il y'a 1 ansDans un contexte marqué par une hausse du prix du baril de pétrole, la délégation du Fonds monétaire international (FMI) n'a pas caché ses inquiétudes quant à l'effet d'éviction que le soutien des prix des produits pétroliers à la pompe a sur les caisses de l’Etat du Cameroun.
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Avec le prix actuel du baril à 150 dollars, le FMI estime que le Cameroun est confronté à des difficultés financières majeures qui pourraient mettre en péril ses objectifs si les niveaux actuels de subvention des prix sont maintenus.
En vue de conclure un nouveau programme avec le FMI en 2024, les autorités camerounaises devront, selon l'exigence du FMI, réduire les subventions d'au moins 30% et augmenter le prix du carburant dans les essenceries, afin de garder un semblant d’équilibre budgétaire et mener à bien les projets de la SND 30. C'est une pilule amère à avaler pour le gouvernement, mais également pour les ménages qui ont déjà du mal à joindre les deux bouts.
Le programme économique et financier du gouvernement, soutenu par la Facilité Elargie de Crédit et le Mécanisme Elargi de Crédit, achevé en juillet 2021, vient d'achever sa cinquième revue. Les sujets abordés par l'équipe conduite par le chef de mission Cemille Sancak se sont également penchés sur l'accord FEC-MDC 2021-2024. La mobilisation des recettes budgétaires, de l’efficacité des finances publiques, de la soutenabilité de la dette, des réformes nécessaires pour renforcer la résilience de l’économie, du développement du secteur privé, des facteurs de fragilité du pays, du renforcement de la gouvernance et de la transparence, etc sont entre autres problématiques qui ont été posées sur la table des débats dans le cadre de cet accord. Les discussions entre le gouvernement et le FMI ont réexaminé la problématique de longue date portant sur l'élimination des subventions aux carburants à la pompe. Le Fonds monétaire international appelle à des réductions significatives du soutien gouvernemental aux prix du carburant en raison de l'incapacité à éradiquer complètement et à révéler la vérité sur les prix à la pompe. Autant de choses qui embarrassent grandement le ministre des Finances et d’autres représentants du gouvernement.
Pour le FMI, la situation budgétaire n’est pas encourageante. La situation sécuritaire ne s’est pas améliorée et son maintien aura de graves implications budgétaires. Face à la flambée des prix du pétrole, le pays doit donc accroître ses sources de revenus et, surtout, maîtriser ses dépenses. Celui-ci culmine à 150 dollars et les analystes du secteur prévoient qu'il restera au-dessus de 100 dollars au moins jusqu'à la fin de l'année. « Le Cameroun ne peut pas faire autrement que de continuer à subventionner face à cette situation d’inflation du pétrole. Mais, si on veut conclure en beauté le programme en juin prochain et négocier la conclusion d’un nouveau programme en juillet, on n’aura pas d’autres choix que de satisfaire cette exigence qui se justifie malheureusement », explique-t-on au ministère des Finances.
Le retour à l'équilibre financier devrait conduire à une réduction de 30 % de la subvention aux carburants, conformément aux exigences du FMI. Conséquence, le litre à la pompe pourrait être porté à 1000 FCFA. D’autant que l'institution de Bretton Woods a encore en travers de la gorge, les décalages sur le coût réel de la subvention des produits pétroliers de 2022 et le report effectué en 2023. En effet, le Fonds monétaire international a rapporté dans son rapport de juin 2023 sur la 4ème revue du programme économique et financier du gouvernement que l’enveloppe de la subvention des produits pétroliers en 2022 a été sous-évaluée. «Le coût total de la subvention aux carburants en 2022 est estimé à plus de 900 milliards de FCFA (3,4 % du PIB), contre 600 milliards de FCFA (2,2% du PIB) dans le budget 2022 révisé», faisait savoir le FMI. Ce décalage, indique le Fonds, était le fait de «la validation tardive de l’importation de carburants facturés à partir de 2022 ». Du coup, assure le Fonds « une subvention carburant supplémentaire d’un coût de 330 milliards de FCFA, soit 1,1% du PIB, a été reportée en 2023, portant les dépenses de subvention des carburants dans le budget 2023 à 453 milliards de FCFA (1,5% du PIB) ».
Le gouvernement devra donc rassurer son partenaire dans l’élaboration de la loi de finances 2024 en réduisant d’au moins 30 % les subventions sur les produits pétroliers et en passant à une nouvelle augmentation plus importante que celle de janvier 2022. Ainsi, le Conseil d`administration du Fonds qui doit se réunir en décembre 2023, tiendra compte de cet aspect. Ce qui va ouvrir les négociations vers le nouveau programme par la transmission de la lettre d`intention au FMI au cours du premier trimestre 2024, en attendant la conclusion de l`actuel en juin prochain. Face à ce nouveau programme, les perspectives financières des ménages s'annoncent sombres. Car face aux défis auxquels le pays est confronté, le gouvernement devra choisir entre protéger la santé de ses caisses et défendre la consommation, sans qu’un réel changement ne se produise sur le terrain. Si en 2022, on a failli franchir la barre des 1000 milliards de Fcfa en une année, il sera difficile de maintenir le niveau de subvention à 453 milliards de FCFA, compte tenu du mouvement du baril de pétrole sur le marché international. Le Cameroun ne dispose pas encore d’une raffinerie compétitive, en tant que petit producteur de pétrole, il devra donc pendant longtemps encore importer du carburant pour son marché.
Ce nouveau programme se concentre sur la résilience et la durabilité et devrait donner la priorité aux investissements directs dans les domaines qui stimulent la croissance. Cela contraste avec les deux premiers programmes, centrés sur la facilité élargie de crédit grâce à des réformes structurelles visant à contenir la dette, à contrôler l'inflation et à rétablir la situation financière du Cameroun. Il est plutôt question de rendre plus visible l'impact de l'appui budgétaire des différents partenaires du programme et de maintenir la tendance budgétaire à la hausse. Cela nécessite nécessairement de développer de nouveaux systèmes fiscaux, de développer le secteur informel, de soutenir le secteur privé et d’optimiser les dépenses budgétaires.
Floyd Miles
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