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Cemac : le prix de la bière fait de la résistance au Cameroun

Dernière mise à jours il y'a 7 mois

Le coût de la bouteille de bière a augmenté au Congo, au Gabon et au Tchad en raison de la hausse des prix des matières premières, des coûts d'énergie, du transport et des charges fiscales contenues dans les lois de finances de plusieurs pays. Le Cameroun, qui ne cède rien malgré les pressions des opérateurs du marché, rame à contre-courant de cette conjoncture que vit le principal groupe brassicole de la sous-région.

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La détérioration de l'économie mondiale, la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont provoqué une augmentation généralisée des prix de l'énergie, des transports et des matières premières. Le secteur brassicole de la zone Cemac est touché par cette situation et doit également faire face à la pression fiscale en plus de ces éléments. En conséquence, les prix de la bière ont été revus à la hausse au Congo, au Gabon et au Tchad.

À Libreville, l'augmentation des prix de la bière a été difficile à avaler en février dernier. La Société des brasseries du Gabon (Sobraga) a été contrainte de donner des explications en raison de la levée de boucliers des consommateurs, qui ont été surpris par une augmentation des prix de la bière dans le pays de 10 à 20 %. Selon le communiqué publié le 07 février 2024, le brasseur a été contraint d’induire cette augmentation de prix de ses produits en raison de la détérioration de la conjoncture internationale. Celle-ci, assure l’entreprise, se caractérise par la « hausse des prix des matières premières, de l’énergie et des transports » observée ces dernières années. Ce qui l’a amené « à rééquilibrer ses prix, afin de continuer à améliorer la qualité et la disponibilité de ses produits sur l’ensemble du territoire ».

En raison de la hausse des obligations fiscales des entreprises du secteur et de la hausse des matières premières, les dirigeants des deux entreprises brassicoles du Congo, Brasco et Bralico, ont revalorisé le prix de la bière de 20%. La volonté du gouvernement de revaloriser le prix du sac de ciment a conduit à cette décision. Cependant, le gouvernement a annulé cette décision quelques jours plus tard, affirmant que l'initiative des brasseurs locaux était contraire à la loi qui régule les prix, les normes commerciales, la détection et la répression des fraudes commerciales.

Au Tchad, si les brasseries du Tchad, la filiale locale du groupe Castel, a mis en avant des raisons similaires pour augmenter ses prix, il y a qu’en plus de cette raison, elle attribue cette mesure aux dispositions de la loi de finances 2024, qui ont revu à la hausse certaines obligations fiscales sur les produits brassicoles. Du coup, depuis le mois de mars dernier, les prix ont augmenté à Ndjamena.

Mocaf, filiale locale du groupe Castel en République centrafricaine, n'a pas encore augmenté ses prix. Cependant, le brasseur est également touché par la hausse des prix du gasoil à la pompe, la revalorisation de 30 % des frais à payer au port sec et la revalorisation de 30 % des prix du malt. Il ne serait donc pas étonnant que le brasseur entérine une augmentation du prix de la bière.

Il semble que ces divers mouvements n'aient aucune influence sur le Cameroun qui fait preuve d'une résistance. En effet, au Cameroun, le gouvernement ignore les appels de la Cameroon association of alcohol producers (Capa). Cependant, les fabricants d'alcool au Cameroun s'inquiètent des modifications fiscales apportées par la loi des finances en matière de marquage fiscal des bières. Même si le gouvernement évoque cette mesure pour surveiller et protéger les intérêts des industriels, les brasseurs sont confrontés à une augmentation des coûts de production en plus d'une conjoncture défavorable dans le secteur ces dernières années.

Les sociétés brassicoles anticipent une augmentation de 30 % des tarifs d'électricité aux entreprises depuis le 1er janvier 2023 afin d'obtenir une augmentation du prix de la bière. À titre d'illustration, en février 2023, le gouvernement a revalorisé les prix des carburants de 630 à 730 Fcfa pour le Super et de 575 à 720 Fcfa pour le gasoil pour faire face à l'explosion de la subvention des produits pétroliers à la pompe. Les prix des carburants ont encore augmenté de 110 Fcfa pour le Super et de 100 Fcfa pour le gasoil en février 2024. Pendant ce temps, en réponse aux coupures incessantes d'énergie électrique observées dans le pays, la loi de finances 2023 a étendu la taxe spéciale sur les produits pétroliers au gaz industriel utilisé comme énergie d'appoint par les entreprises. Les utilisateurs du gaz industriel qui étaient fournis par Gaz du Cameroun devaient payer 70 Fcfa au fisc pour chaque mètre cube de gaz utilisé. Des tarifs de 20% ont été augmentés par le gazier en profitant de la situation.

Les dirigeants de l'industrie brassicole camerounaise se plaignent de la suppression de l'abattement sur les droits d'accise pour les bières et de la réduction de 60 % de ceux des boissons gazeuses dans la loi des finances 2024, malgré l'ajustement de 10 Fcfa de cette taxe dans la loi des finances 2024. Selon l'association des producteurs d'alcool, cela entraînera une augmentation de leurs obligations fiscales d'environ 12 milliards de Fcfa. En plus de ces obligations fiscales en hausse, les entreprises brassicoles doivent faire face à l'importation massive de matières premières, d'emballages, d'équipements et d'autres pièces de rechange. Une dépendance aux importations qui représente environ la moitié du coût de production, les exposant ainsi aux facteurs extérieurs tels que la guerre entre la Russie et l'Ukraine. Selon un rapport de 2022 du groupement inter patronal du Cameroun, cela entraîne plus de 40 milliards de pertes annuelles en raison du blocage des prix.

Le gouvernement prône la paix sociale et maintient le dialogue avec les brasseurs pour une sortie de crise concertée sans douleur pour les consommateurs, malgré ce faisceau d'éléments. Après avoir demandé une augmentation de 50 Fcfa en fin d'année dernière, les entreprises brassicoles demandent maintenant une augmentation de 100 Fcfa qui devrait être autorisée par le gouvernement pour un équilibre du secteur.

«Les prix de la bière sont inchangés depuis 2019. Nous avons les seuls produits dont le prix n’a pas changé depuis quatre ans, malgré une inflation exacerbée depuis le Covid-19 et le conflit Russo-ukrainien avec ses conséquences néfastes sur le prix du fret maritime et le coût des matières premières. C’est un véritable tsunami inflationniste qu’on vit aujourd’hui (…) Nous ne pouvons pas continuer à avoir des prix bloqués d’un côté, et subir l’inflation de plein fouet de l’autre côté. Nous nous sommes engagés auprès du gouvernement à l’aider à lutter contre la vie chère. Je pense que toute la filière brassicole a parfaitement joué son rôle en maintenant les prix tels qu’ils sont. Mais, ça devient intenable», expliquait Stéphane Descazeaud, Dg de Boissons du Cameroun dans une interview en 2023. Pour lui, « il est temps de faire un geste d’une certaine manière aux producteurs pour s’assurer qu’ils vont continuer à investir et à produire de manière à satisfaire la demande et satisfaire le marché dans les années qui viennent ».

La plupart des grands groupes brassicoles sont touchés par le mouvement mondial des prix de la bière. En raison de la hausse des intrants, le groupe danois Carlsbeg, brasseur de plusieurs marques, a annoncé la revalorisation des prix de ses produits en février dernier. Le directeur général de Carlsberg a déclaré lors d'une conférence de presse que si les prix de certains produits comme l'orge ou l'aluminium utilisés dans les canettes ont diminué, ceux du sucre et du verre ont encore augmenté.

 

 

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Ophelie Ada Zoa
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