Ce 08 août, l’agence de notation américaine Standard&Poor’s Global Rating a annoncé avoir abaissé « temporairement » la note en devise de long et court terme du Cameroun à « ‘SD/SD’ » ou encore défaut « sélectif », dernier cran avant le défaut de paiement. « Nous avons abaissé la note du Cameroun à « SD/SD », suite à des retards de paiement du principal et des intérêts de la dette à long terme du pays », indique l’agence.

Cette notation négative intervient alors que le 27 juillet dernier, Moody’s a abaissé la note du pays de deux crans de B2 à Caa1, au motif que le gouvernement fait face à des difficultés financières, lesquelles sont à l'origine des retards dans le remboursement de sa dette extérieure de fin 2022 à 2023. Toutefois, l'agence américaine est optimiste quant à l'avenir et pourrait même relever la note du Cameroun à CCC puisque le pays a remboursé une partie de sa dette. En effet, le Cameroun a remboursé 360 milliards de FCFA de dette extérieure au premier semestre 2023, en hausse de 12%, selon la Caisse autonome d'amortissement (CAA), l'organe directeur de toutes les caisses d'emprunts publics.

Comme Moody's, Standard & Poor's justifie cette notation négative en invoquant le non-respect par Yaoundé de ses obligations envers la Deutsche Bank Spain ; un créancier privé dont l'encours de la dette sur le pays s'élève à 20,75 milliards de FCFA à fin juin, indique la CAA. « Le gouvernement a retardé les paiements à la Deutsche Bank Espagne au-delà de la date d’échéance », indique l’agence.

Selon Moody's, les paiements en question sont « intervenus après une série de demandes de liquidités adressées au gouvernement, notamment des subventions plus élevées pour le carburant et une augmentation des dépenses hors budget pour des besoins de sécurité croissants ».

En fait, selon S&P, les dépenses en subventions des prix à la pompe ont atteint 900 milliards de FCFA en 2022 en raison de la hausse des prix du pétrole sur les marchés internationaux. L’agence de notation explique que « La hausse des prix mondiaux du pétrole et du gaz naturel a stimulé les recettes du compte courant et les recettes publiques du Cameroun, un exportateur d’hydrocarbures. Néanmoins, cela a également conduit à un écart grandissant entre les prix à l’importation des produits pétroliers raffinés et les prix intérieurs à la pompe, que le gouvernement a maintenus fixes tout au long de l’année. Cela a créé des pressions sur les dépenses non budgétisées ».

S&P craint que la récente décision du gouvernement nigérian de mettre fin à son programme de subventions aux carburants n'exerce de nouvelles pressions fiscales sur le Cameroun. « La fin de la contrebande de carburant en provenance du Nigeria a fait grimper les prix de l’essence dans les régions frontalières du nord du Cameroun. Ce qui pourrait entraîner des pressions politiques sur les autorités pour qu’elles dédommagent les ménages et les entreprises touchés par cette hausse », indique encore l’agence.

C'est un autre coup dur pour le Cameroun. En effet, le pays prépare 200 milliards de prêts en devises d'ici la fin de l'année alors que la situation financière mondiale se détériore en raison de la guerre en Ukraine. Cette notation en baisse signifie que le Cameroun pourrait être invité à payer davantage les coupons annuels sur ses eurobonds actuels. De plus, le Cameroun devra payer plus d'argent pour contracter de nouveaux emprunts commerciaux sur le marché international, compte tenu du risque qu’il représente actuellement pour les investisseurs. Au moment où l'on écrit ces quelques lignes, Yaoundé compte uniquement sur Rothschild & Co pour réduire la teneur en sel de sa note globale.